Il était 2 fois



Il était deux fois est un thriller labyrinthique qui joue avec les codes du genre, mêlant suspense, horreur et réflexion sur la mémoire, l’art et la noirceur humaine. Thilliez confirme son talent pour construire des intrigues complexes et captivantes, faisant de ce roman une œuvre marquante pour les amateurs de thrillers psychologiques.

Résumé

L’histoire débute en 2008, à Sagas, une petite ville montagnarde, où Julie Moscato, 17 ans, disparaît mystérieusement, ne laissant derrière elle que son vélo appuyé contre un arbre. Son père, Gabriel Moscato, lieutenant de gendarmerie, se lance dans une quête obsessionnelle pour la retrouver. Ses recherches le mènent à l’hôtel de la Falaise, où, épuisé, il s’endort dans la chambre 29 au deuxième étage après avoir consulté le registre de l’établissement. À son réveil, en pleine nuit, une pluie d’oiseaux morts s’abat sur la ville. Désorienté, Gabriel découvre qu’il se trouve désormais dans la chambre 7 au rez-de-chaussée, et surtout, qu’on est en 2020. Douze ans se sont écoulés, dont il n’a aucun souvenir, et sa fille n’a toujours pas été retrouvée. À partir de ce point, Gabriel, rongé par l’amnésie et le désespoir, reprend l’enquête avec l’aide de Paul Lacroix, son ancien meilleur ami devenu rival, notamment à cause d’une histoire personnelle complexe impliquant la femme de Gabriel. L’enquête, labyrinthique, explore des pistes sombres : une société secrète appelée les Xiphopages (composée de personnages comme Caleb Traskman, Henri Chmielnik, Andreas Abergel et Dmitri Kalinine), des crimes atroces déguisés en œuvres d’art, et des références à la mémoire, à la dualité et à l’enfermement. Le roman joue sur l’intertextualité, notamment avec Le Manuscrit inachevé, et utilise des procédés de métafiction, comme la mise en abyme, pour brouiller les frontières entre réalité et fiction. La découverte d’un corps relance l’investigation, menant Gabriel et Paul à travers la France, la Belgique et la Pologne, dans des lieux sinistres où l’horreur se mêle à une réflexion sur l’esthétique du crime.

Analyse 

Thèmes principaux :Mémoire et amnésie : L’amnésie dissociative de Gabriel est au cœur du récit, explorant comment la perte de mémoire affecte l’identité et la quête de vérité. Thilliez s’appuie sur des bases scientifiques pour ancrer ce thème dans une réalité crédible.

Dualité et mise en abyme : Le titre Il était deux fois reflète la dualité omniprésente (passé/présent, réalité/fiction, amitié/rivalité). La structure narrative, avec ses jeux de miroir et ses références au Manuscrit inachevé, crée une métafiction où le lecteur est constamment déstabilisé.

Enfermement et labyrinthe : Le roman utilise la métaphore du labyrinthe, tant dans l’intrigue (enquête complexe) que dans les lieux (vallées encaissées, hôtels glauques). L’enfermement psychologique des personnages, notamment Gabriel, renforce l’atmosphère oppressante.

Crime comme art : Thilliez explore l’idée provocatrice du crime comme un « huitième art », où les Xiphopages transforment leurs actes macabres en performances artistiques, questionnant les limites de l’éthique et de l’esthétique. Il y a de nombreuses références à des peintres et à leurs œuvres comme Le Caravage.

Personnages clés :
Gabriel Moscato : Père désespéré et ancien gendarme, il est le moteur de l’histoire, luttant contre son amnésie pour retrouver sa fille. Sa quête est autant physique que psychologique.
Paul Lacroix : Ami et rival de Gabriel, il incarne la rationalité face à la « folie » de Gabriel, mais leur relation est marquée par une tension liée à un passé commun.
Julie Moscato : Bien que disparue, sa présence hante le récit, symbolisant l’espoir et la douleur de Gabriel.
Les Xiphopages : Cette société secrète, composée de figures comme Caleb Traskman (romancier fictif), représente la noirceur humaine et l’exploration des perversions.

Style et construction :
Thilliez excelle dans la construction narrative, avec une intrigue minutieusement ficelée et des rebondissements constants. Son style fluide et addictif, combiné à une documentation rigoureuse (notamment sur l’amnésie et le milieu artistique), rend le roman captivant, bien que certaines scènes soient particulièrement glaçantes. Le rythme, lent au départ, s’accélère pour devenir haletant, maintenant le lecteur en haleine jusqu’à une fin originale et ouverte à interprétation.

Intertextualité et références culturelles :
Le roman est riche en clins d’œil, notamment à Le Manuscrit inachevé, mais aussi à des œuvres comme Les Oiseaux d’Hitchcock ou des concepts littéraires comme les palindromes et les anagrammes. Ces éléments enrichissent l’expérience de lecture et invitent à une réflexion sur la narration elle-même.

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